Matters of Early Modern ecologies
Hui Luan Tran 1, Maurice Sass 2, Philippe Cordez 3
1University Of Mainz - Mainz (Germany), 2Alanus University Of Arts And Social Sciences - Alfter (Germany), 3Musée Du Louvre - Paris (France)
Sujet en anglais / Topic in english
The formation of man from a lump of clay is an ancient narrative that was often transferred onto artistic practice in the premodern world and especially in Early Modern Europe. Inherent in this elevation of art to a godlike activity that gives form to matter, is an eminently hegemonic gesture. In this session, as a contrast, we want to take an eco-critical perspective on how artists connected materials by layering, transferring, and networking. With a focus on this relational understanding of artistic practice ecological dimensions can be recognized. Art making always means dealing with materials whose availability is unstable and potentially exhaustible.
The research of the last two decades has made clear that works of art and their materiality were highly involved in the natural history discussions of the early modern period. This is especially true regarding unusual, monstrous, and non-European objects in sacral and courtly collections in Europe. Many excellent studies have thus problematized (from postcolonial and other perspectives) the orders, hierarchies, and values implied by these artworks. Eco-critical perspectives, in contrast, have been largely disregarded. Accordingly, there has been insufficient investigation of how the artistic use of materials has been a crucial arena for shaping, reflecting, and subverting the nature/culture dichotomy identified by Philippe Descola, Bruno Latour, Timothy Morton, and others as an early modern root of today’s global ecological crisis.
The session will address these matters of early modern and pre-modern ecologies from different viewpoints:
Considering artistic techniques ecologically:
- Artistic creation is a multi-layered process of shaping that brings materials into specific physical states and mutual relationships, while symbolically correlating objects with each other. How can artistic techniques be described as practices of ecology as based on these interlinking characteristics? What conclusions can be drawn about complex artistic procedures or chaînes opératoires in which different steps, people and places are involved?
Reflecting artistic material as resources:
- Clay, stone, wood, metal, fabrics, gemstones, paper, pigments, and many other materials are resources that artists have at their disposal. How was the value of these ‘natural’ and limited resources reflected? How do aesthetic and social aspects relate to these values?
Recycling artistic materials:
- In artistic processes, materials are often subject to reuse or repurposing. Even before that, building materials or drawing and painting grounds can be the result of a recycling process. To what extent do conceptions of sustainability or prodigality come into play here? And what are the aesthetic and semantic costs and benefits of reuse and repurposing of materials in works of art?
Shaping other ecologies:
- The use of artistic materials creates ecologically analyzable systems and implicit leitmotifs of natural orders. Moreover, many early modern artworks do not simply shape, but challenge the culture/nature dichotomy and make it possible for us to imagine and experience diverse relationships between animate and inanimate beings on this planet. What is the role of the materials’ semantics and their sensuous qualities in these cases? How can works of art elude usurpatory manipulation and thus configure alternative relationships of humans to the world?
Sujet de la session en français / Topic in french
Matières à écologies à l’aube de la modernité
Le récit ancien de la formation des êtres humains à partir d’une motte d’argile a souvent été transcrit dans la pratique artistique, en particulier en Europe à l’époque dite « moderne » (vers 1400-1800). Cette élévation de l’art à un acte d’ordre divin donnant forme à la matière désigne un geste éminemment hégémonique. Dans cette section, nous souhaitons au contraire considérer dans une perspective éco-critique comment les artistes ont associé des matériaux en les superposant, en les transférant ou en les mettant en réseau. Faire de l’art, c’est toujours faire avec des matériaux dont la disponibilité n’est pas constante et peut se tarir.
Les recherches des deux dernières décennies ont souligné le rôle essentiel des œuvres d’art et de leur matérialité dans les débats de l’époque moderne sur l’histoire naturelle, ainsi notamment pour les objets inhabituels, monstrueux ou non européens rassemblés dans les églises et les cours d’Europe. D’excellents travaux ont interrogé, dans une perspective postcoloniale ou autre, les hiérarchies d’ordre et de valeur que ces objets impliquent. Les approches éco-critiques restent par contre largement négligées. Il manque des études montrant comment l’usage artistique des matériaux fut à l’époque moderne un lieu central d’élaboration, de mise en forme, de réflexion, voire de subversion quant à la dichotomie nature/culture identifiée par Philippe Descola, Bruno Latour, Timothy Morton et d’autres comme une racine de la crise écologique globale actuelle.
La session considèrera ces matières à écologies avant et pendant les débuts de la modernité, selon plusieurs points de vue :
Considérer les techniques artistiques écologiquement :
- La création artistique est un processus de mise en forme à niveaux multiples qui met les matériaux dans des états physiques spécifiques et les lie entre eux, tout en établissant des relations symboliques entre les objets. Comment les techniques artistiques, fondées sur ces propriétés relationnelles, peuvent-elles être décrites comme des pratiques écologiques ? Que conclure à propos de procédures artistiques ou chaînes opératoires complexes impliquant une pluralité d’étapes, d’acteurs et de lieux ?
Penser les matériaux artistiques comme des ressources :
- Argile, pierre, bois, textiles, gemmes, papier, pigments et bien d’autres matériaux sont des ressources dont les artistes disposent. Comment la valeur de ces ressources, conçues comme « naturelles » et limitées en quantité, a-t-elle été pensée et mise en scène ? En quoi les aspects esthétiques et sociaux étaient-ils liés à ces valeurs ?
Recycler les matériaux artistiques :
- Dans les processus artistiques, les matériaux sont souvent réemployés en innovant. Plus simplement, les matériaux de construction ou les supports pour dessiner ou peindre peuvent résulter d’un recyclage. Dans quelle mesure les notions de durabilité ou de prodigalité interviennent-elles ici ? Quels sont les coûts ou bénéfices esthétiques et sémantiques de la réutilisation des matériaux en art ?
Façonner des écologies alternatives :
- L’usage des matériaux artistiques crée des systèmes analysables écologiquement et produit implicitement des Leitmotivs, motifs directeurs instaurant des ordres du monde compris comme naturels. Or quantité d’œuvres d’art de l’époque moderne non seulement façonnent, mais questionnent la dichotomie culture/nature, nous permettant ainsi d’imaginer – en en faisant l’expérience – des relations diverses entre êtres animés et inanimés sur cette planète. Quels sont ici les rôles de la sémantique et des qualités sensibles des matériaux ? Comment les œuvres d’art peuvent-elles éviter la manipulation usurpatoire pour configurer d’autres relations entre les humains et le monde ?