Accéder au contenu principal

36ème Congrès du CIHA - Lyon 2024

Parrainé par le Ministère de la Culture,
le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche,
le Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères

L’éloge de la matière. La matérialité et ses enjeux dans le domaine des Monuments historiques

Justine Croutelle 1, Lili Davenas 2


1
Drac Aura - Lyon (France), 2 Musée Bourdelle - Paris (France)

Sujet en anglais / Topic in english

In praise of matter : conservation of artifacts' materiality relating to the world's cultural heritage

“We only restore the material of a work of art”, specifies Cesare Brandi in his Theory of restoration. “The material of a work of art” is, according to Brandi, of a double nature, where one must distinguish the structure and the aspect. In other words, what constitutes the work of art and what it shows. It should therefore be considered as the core of the restoration process, which transforms the material and its temporality.

The ethics of restoration are governed by international charts, they all give a major place to the material. Nevertheless, the process of restoration aims at preserving historical heritage, for transmission. As such, it cannot be considered without other notions, such as aesthetics, senses, memory, functionality. Another approach of materiality also has to be considered regarding specific types of inheritage. The substance of historical gardens is, by definition, living, perishable and renewable, whereas scientific and technical inheritage is mainly defined by its function. Furthermore, scientific research as well as the plurality of international practices invite us to reconsider these principles. The relationship established in Japanese culture between intangible cultural heritage and tangible cultural heritage proves that other patterns can be accepted to transmit architectural inheritage. How should the substance of a work of art be defined? What has to be preserved and transmitted? If a work of art is brought to live, grow and die, what does one preserve? What should be the role of immateriality and sensitivity in the conservation-restoration process (for instance, harmony for an organ, light for stained-glass)?

Sujet de la session en français / Topic in french

« On ne restaure que la matière de l’œuvre d’art. » Ce postulat, donné par Cesare Brandi dans Théorie de la restauration, place la matière au cœur du processus de restauration. La « matière de l’œuvre d’art » est pour Brandi d’une double nature, où l’on doit distinguer la structure et l’aspect, autrement dit d’une part ce qui constitue l’œuvre, et d’autre part, ce qu’elle donne à voir. Elle est au cœur des pratiques de conservation et de restauration, qui transforment la matière de l’œuvre d’art pour la placer dans une temporalité nouvelle.

Les grandes chartes qui régissent la déontologie de la restauration donnent une place centrale au matériau, et donc à la structure de l’œuvre d’art. L’acte de restaurer a cependant pour objectif premier la conservation pour la transmission aux générations futures. Il ne saurait, à ce titre, se passer d’autres notions, telles que l’esthétique, l’approche sensorielle et mémorielle, l’usage. La question de la matérialité se pose par ailleurs différemment à l’approche de certaines typologies patrimoniales : le patrimoine des jardins est, par nature, « vivant, périssable et renouvelable[1] », tandis que le patrimoine technique se définit en grande partie par sa valeur d’usage. Du reste, les avancées scientifiques et la pluralité des approches internationales invitent à échanger sur ces grands principes. La relation établie, dans la culture japonaise, entre le patrimoine culturel immatériel et le patrimoine culturel matériel montre qu’une approche différente peut être admise pour la transmission du patrimoine architectural. Comment définir la substance d’une œuvre ? Que veut-on conserver et transmettre ? Quelle est la matière que l’on conserve, lorsque cette dernière est amenée à vivre, à croître et à mourir ? Quelle place donner à l’immatériel et au sensoriel dans la conservation-restauration (exemples : l’harmonie pour un orgue, la lumière pour les vitraux) ?

[1] Charte de Florence, article 2 (1982)